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Chantier: Apataki l’alternative des Tuamotu.
Cadre idyllique situé dans un lagon turquoise quasiment inhabité, la solution du carénage et de l’hivernage de son voilier en plein cœur de la Polynésie française semble trouver là un compromis presque parfait.
Nous en avions entendu parler au Panama, un chantier de carénage allait ouvrir ses portes à Apataki. A l’époque nous ne savions même pas ou se trouvait Apataki. Depuis, des copains sont venus, tous satisfaits de la solution comme indiqué par un skippeur dans le livre d’or du chantier « Une autre manière de caréner ». A notre tour, nous avons « testé » et quand on teste le seul risque c’est de ne plus vouloir repartir…
C’est en juillet 2009 que le chantier familial a ouvert ses portes. « Nous sommes installés à Apataki depuis 1992 au sein de notre ferme perlière. C’est comme cela que nous avons commencé à rencontrer les voiliers qui venaient visiter la perliculture. Ils mouillaient devant le « Motu » (îlot) et restaient quelques jours dans le coin, achetaient des perles. » raconte Alfred Lau le patron de Apataki Carénage. C’est lui qui a saisi l’importance de cette installation au cœur d’une région grande comme l’Europe dépourvue d’infrastructures en dehors de Tahiti et de Raiatea, surpeuplés. Il faut dire que la famille Lau implantée en Polynésie depuis des temps immémoriaux est pionnière en la matière. L’accueil est une seconde nature pour cette famille « paumotu » (habitants des Tuamotu ) qui arrive à faire cohabiter professionnalisme et ambiance amicale.
« Nous avons cherché un moyen technique adapté au lieu et au plus grand nombre de voiliers » indique Alfred Lau, « c’est une solution autour d’une rampe en béton et d’un chariot hydraulique à quatre essieux qui a été retenue ». La société Nauti Park de St Brevin les pins a été chargée de la réalisation du chariot qui répond parfaitement au cahier des charges. En 15 minutes montre en main le voilier est sorti de l’eau en toute sécurité. Tony, le fils d’Alfred, plonge systématiquement pour bien placer les tampons sur la coque et surveiller le calage. Le tout est hissé hors de l’eau sur la rampe, tiré par le tracteur à 4 roues motrices de 75 cv. Un nettoyage à haute pression fait partie du forfait, avant de se voir placé en zone d’hivernage pour ceux qui veulent stocker leur bateau quelque temps.
Les possibilités du chantier en matière de levage concernent environ 90% de la flottille des voiliers qui passe en Pacifique. « Nous levons des catas jusqu’à 9 mètres de large sous nacelle et des monocoques jusqu’à 2,20 mètres de tirant d’eau » explique Tony. La rampe en béton est ancrée dans le récif sur un mètre vingt de profondeur ce qui stabilise l’ensemble. La remorque peut lever 20 tonnes, un investissement lourd pour cette société familiale d’autant que les frais de transport de métropole en Polynésie puis de Tahiti aux Tuamotu ont alourdi la facture.
Zone de travail:
Le parc de stockage est situé à une centaine de mètres de la ferme perlière ce qui donne à l’ensemble un côté agréable loin du stress habituel dans les chantiers surpeuplés. « Nous avons de la marge de progression et chaque année le nombre de bateaux augmente doucement » reconnaît Alfred qui ne souhaite pas dépasser un certain seuil qui nuirait à la convivialité du lieu. « Nous avons une relation exceptionnelle avec les voiliers, c’est ce qui nous motive ». Du coup la zone technique se remplit doucement, elle peut accueillir une vingtaine de catamarans et trente monoques en même temps. Le sol est composé exclusivement de corail concassé naturel, ce qui a la particularité de ne pas lever de poussière et de faciliter les opérations de peinture ou de stratification.
Depuis un mois sur la zone de carénage le Sun fizz « Orphée ». En famille avec son épouse Sandrine et ses deux enfants, Philippe semble enchanté. « Cela peut paraître bizarre de le dire, mais c’est le paradis comme cadre de travail. Nous avons entamé et mené à bien des travaux assez importants, nous avons fabriqué une jupe, refait entièrement le safran, changé toutes les vannes, les passe coques, retiré les vieilles couches d’antifouling, c’est du travail mais le cadre est tellement superbe que le temps passe vite » reconnaît Philippe qui profite d’un des box mis à la disposition des voiliers pour travailler à l’abri des intempéries, rares, et du soleil, omniprésent. « Nous avions prévu les travaux et acheté le matériel à Tahiti mais quand il manque quelque chose, soit on le trouve dans le petit magasin du chantier, soit ils le font venir de Papeete dans des délais ultra rapides ».
Le chantier dispose d’un agent a Tahiti, chargé des relations administratives avec les douanes, des réservations d’avion ou bateau inter îles et surtout d’approvisionner le chantier pour tout ce qui est du domaine des pièces détachées de mécanique ou accastillage. Du coup même au beau milieu de l’archipel des Tuamotu, les livraisons sont presque quotidiennes. Un vol d’air Tahiti relie Apataki à Papeete trois fois par semaine et une « goélette » le cargo inter îles, fait escale chaque deux semaines et ramène le matériel lourd commandé.
Cette organisation fait beaucoup pour que l’on se sente à la fois loin de tout et proche de tout ce dont on a besoin. « Ici le temps ne compte pas, nous avons de l’eau douce à volonté, de l’électricité, du matériel professionnel et si on est bricoleur on s’en sort super bien » estime Philippe. De plus ceux qui ne bricolent pas peuvent compter sur les compétences locales, Tony maitrise la stratification et le traitement anti osmose, la petite mécanique est entre les mains d’Alfred qui n’hésite pas à demander conseil aux experts de Tahiti et à les faire venir en cas de besoin.
Enfants rois.
Le CNED le matin et la plage le reste du temps. Les enfants des voiliers, français mais aussi anglais, suisses ou belges semblent apprécier pleinement le cadre de leur escale. Souvent lorsque les voiliers arrivent en Polynésie, ils s’évertuent à récupérer les cours du CNED, ce qui n’est jamais chose facile, entre retards et difficultés de livraison. Depuis des années le chantier Apataki reçoit les cours pour les voiliers qui le demandent, évitant d’aller rien que pour cela, sur Papeete. Sandrine du voilier Orphée est ravie « il y a beaucoup de place, c’est vert, aucun danger, nous faisons école le matin et les enfants jouent le reste du temps, ils s’éclatent, se font pleins d’amis et progressent beaucoup en langues étrangères ».
Services
La gentillesse des polynésiens n’est plus à démontrer. Elle se confirme d’autant plus que vous allez dans des lieux retirés, ce qui se comprend. A Apataki Carénage elle atteint des proportions inhabituelles, la table d’hôtes est souvent remplie d’invités, les poissons et crustacés du lagon se disputent avec les bons plats sortis des fours des voiliers, le tout dans une ambiance chaleureuse.
Le village d’Apataki.
Le chantier propose un service de navette qui vous dépose au village d’Apataki en moins d’une heure. Surplace vous pouvez faire des courses dans les petites épiceries, aller à la poste ou à l’infirmerie, prendre l’avion ou en revenir. Un service d’Internet est proposé au chantier et dans quelques mois c’est Iaoranet en wifi qui sera disponible, ce qui va décupler la vitesse de connexion. Une restauration locale est également proposée et même de petits bungalows pour ceux qui veulent sortir du voilier le temps du carénage. Pour ceux qui sont sur l’eau, des corps morts de courtoisie sont mis à disposition gratuitement. Les perles de la ferme, montées en bijoux ou naturelles sont disponibles pour ramener un souvenir authentique à des prix très abordables.
Site privilégié.
Toute cette réalisation n’a été possible que grâce à la géologie ultra favorable dont à bénéficié la famille Lau. Alors que l’eau douce est une denrée très rare dans les Tuamotu, le Motu ou est situé le carénage dispose d’un puits d’eau potable qui fournit de l’eau en quantité. Cette facilité change la donne car sans eau, impossible de monter un chantier correct. Autre phénomène qui a facilité l’installation, le bord du littoral est profond de plus de deux mètres alors qu’habituellement il remonte et est entouré de patates. La encore c’est un détail qui fait que tout fonctionne techniquement. En fin, la zone de stockage est située bien à plat et en hauteur, protégée par des cocotiers, situation idéale en cas de cyclone fort heureusement rares. De plus des plots d’ancrage en béton permettent de fixer les voiliers bien comme il faut, détail apprécié par les compagnies d’assurance.
www.apatakicarenage.com
15°33.4 Sud 146°14.3 Ouest
José Arocena